« La première oeuvre que j’ai achetée me tournait le dos, un nu torsadé comme une colonne, dont la faible profondeur de champ évoquait des horizons lointains et une terrifiante intimité. La seconde était un cadavre, celui d’un flamand rose flamboyant, dont les plumes menaçaient de s’échapper au moindre courant d’air. Richard est collectionné avidement à travers le monde. Il était grand temps qu’il rejoigne le fonds de la MEP, et s’expose au public parisien. C’est un honneur et une joie d’en être le déclencheur. » Rafaël Biosse Duplan
Les œuvres de Richard Learoyd sont réalisées à l’aide de l’un des procédés photographiques les plus anciens : la camera obscura. Learoyd en fabrique une sur mesure et créé un appareil photo de la taille d’une pièce dans lequel le papier photographique est exposé. Le sujet – souvent une personne, habillée ou nue, parfois une nature morte – se trouve dans la pièce adjacente, séparé par une lentille. Richard Learoyd choisit avec précision ses modèles, leurs vêtements et chaque détail de l’image est minutieusement contrôlé par l’artiste. Pour les images en couleur, la lumière qui tombe sur le sujet est directement focalisée sur le papier photographique, sans négatif interposé. Travaillant avec du papier Ilfochrome à inversion de couleur, Richard Learoyd utilise ainsi sa camera obscura pour rendre une seule image positive, unique et très détaillée, sans négatifs ni technologie numérique. Le résultat est une image sans grain.
Pour les images en noir et blanc, c’est sur un négatif géant que l’image se forme et les tirages sont réalisés à l’aide du procédé négatif/positif inventé en 1841 par l’Anglais W. H. Fox Talbot. Les négatifs mesurent jusqu’à 2 mètres de large, faisant de ses tirages par contact gélatine-argentique les plus grands jamais réalisés. Accompagné de sa propre camera obscura, Learoyd voyage en dehors de son studio londonien dans la campagne anglaise riche en histoire de l’art, le long de la côte californienne et à travers l’Europe de l’Est, produisant des images qui ont longtemps été latentes dans son imagination.
Les photographies de Richard Learoyd créent des récits qui traversent l’espace et le temps. Les personnes qui apparaissent dans ses images semblent habiter un monde d’une intensité psychologique particulière. Bien qu’elles semblent très contemporaines, ces figures possèdent également une qualité intemporelle qui les inscrit dans l’histoire de l’art. Les sujets qu’il choisit pour ses natures mortes possèdent une beauté exceptionnelle et évocatrice. Ses images deviennent de plus en plus complexes. Par exemple le groupe de pies piégées dans des fils (A murder of magpies, 2013) ou encore lorsqu’il découvre un sac discret et mystérieux avec des filets de pêche sur une plage du Portugal (The sins of the father, 2016).
Deux tirages en couleurs et trois tirages noir et blanc rejoignent la collection de la MEP, montrant une partie de l’exercice technique et esthétique du photographe Richard Learoyd.