Patrick Zachmann

Patrick Zachmann
Mare Mater

Il s’agit d’un voyage, un voyage de mémoire et d’exils. Ce voyage tisse le fil de toutes les destinées que je croise. Celles des migrants, quittant leur pays de la rive sud de la Méditerranée, pour fuir le chômage, l’ennui, l’absence d’avenir. Celles des femmes, des mères, qui les laissent partir ou découvrent trop tard qu’ils sont déjà partis. Moi, je pars à la recherche des racines de ma mère, celles qu’elle a voulu oublier.

C’est l’histoire de la Méditerranée, l’histoire de la mer, l’histoire des mères. Parfois, les fils ne reviennent pas. Parfois, les fils périssent en mer. Et puis il y a aussi le rêve, le fantasme. Celui d’une Europe qui ne sera jamais aussi belle, aussi accueillante, aussi riche que vue de l’autre côté. J’ai commencé à interroger et filmer ma mère, âgée de 90 ans, qui, atteinte de graves troubles de la mémoire, se souvient peu de l’Algérie, son pays natal. Juste à quel point elle voulait l’oublier.

Je n’avais ni photos – un comble pour un photographe-, ni récit de l’histoire familiale du côté de ma mère, juive séfarade. Aujourd’hui, je fais le voyage à l’envers. Je fais le voyage des origines perdues, de la part manquante, tue, cachée.

Patrick Zachmann

 

Commissariat : Emma Hascoet et Anne Lê Tri

 

Image en une : Patrick Zachmann, Italy, Lampedusa, July 2011. ©Patrick Zachmann